3.1

Notre approche de rédaction pour ce rapport

Il s’agit du premier rapport exhaustif sur les répercussions, les expériences et les approches en matière de changements climatiques rédigé du point de vue des Premières Nations, des Inuit et des Métis vivant sur le territoire que l’on appelle actuellement le Canada. Ce rapport a pour objectif de reconnaître, de mettre en évidence et de mieux faire connaître le savoir, les droits, l’expertise, les enjeux, les perspectives et les expériences autochtones concernant les changements climatiques et leurs répercussions au Canada. Nous souhaitons que ce rapport soit utile dans les domaines de la recherche et des politiques, ainsi qu’au sein des collectivités elles-mêmes. On y reconnaît la diversité des peuples autochtones du Canada sur les plans de la culture, de la capacité, de la gouvernance et de la géographie, et offre une occasion unique d’intégrer directement les connaissances et les expériences autochtones au processus d’évaluation nationale des connaissances du Canada.1

Notre démarche est centrée sur les approches fondées sur les droits et les responsabilités, visant à rehausser le travail des Premières Nations, des Inuit et des Métis dans la prise en charge de l’action climatique aux niveaux local, régional, national et mondial. Cette approche est de plus en plus reconnue et soutenue par le gouvernement du Canada, qui fait progresser les travaux sur le leadership climatique autochtone.

Notre équipe d’auteurs, composée de plus de vingt auteurs et réviseurs, est diversifiée et comprend des universitaires, des dirigeants, des étudiants, des femmes, des hommes, des récolteurs et des jeunes autochtones de l’ensemble du pays. Nous sommes affiliés à des universités, à des organisations autochtones nationales, à des organisations communautaires et à des organisations non gouvernementales autochtones (ONGA); nous sommes tous profondément engagés à prendre soin de nos familles et de nos collectivités et à maintenir des liens étroits avec elles. Tous les membres de notre équipe d’auteurs et de réviseurs sont autochtones, à deux exceptions près : Shari Fox et Anne Kendrick, qui ont toutes deux plusieurs dizaines d’années d’expérience de travail avec les populations autochtones.

L’élaboration de ce rapport a commencé par une réunion de l’équipe d’auteurs sur les terres (Aki) algonquines anichinabées (également connu sous le nom d’Ottawa) en février 2020. Cette réunion a été cruciale pour établir des liens personnels et a porté principalement sur l’élaboration conjointe de grands principes clés (voir l’encadré 1) et de messages clés pour orienter notre travail. Alors que nous avions initialement prévu de nombreuses réunions d’auteurs en personne sur le territoire et dans nos collectivités tout au long de l’élaboration du rapport, la pandémie mondiale a forcé le passage à une collaboration à distance (voir la section 3.5).

Les auteurs ont élaboré conjointement les sections du rapport en fonction de leurs expériences uniques, de leur expertise et de leur formation professionnelle, en revenant et en réfléchissant constamment sur les principes et les valeurs clés établis au début du processus (voir l’encadré 1). En outre, nous avons sollicité des contributions externes; nous avons, par exemple, organisé un atelier de rédaction virtuel pour renforcer des parties particulière du texte et pour élaborer collectivement la section « Aller de l’avant », qui aborde les lacunes en matière de connaissances et les nouveaux enjeux (voir la section 10.0).

Pour renforcer la rigueur de notre approche, le rapport a fait l’objet d’un examen par les pairs, c’est-à-dire par des universitaires issus des populations des Premières Nations, des Inuit et des Métis. Ce groupe diversifié d’experts a veillé à ce que les perspectives autochtones soient correctement exprimées, a identifié les forces et les faiblesses et a contribué à une meilleure représentation régionale.

La collaboration a été fondamentale tout au long de l’élaboration de ce rapport; les messages clés, les principes clés et le contenu ont été élaborés de manière itérative par l’équipe d’auteurs et peaufinés au fil du temps. La démarche vaste et participative utilisée pour élaborer ce rapport reflète l’esprit de collaboration qui existe et qui est nécessaire pour comprendre les répercussions des changements climatiques du point de vue des Premières Nations, des Inuit et des Métis.

Au cours de l’élaboration de ce rapport, nous avons rencontré des difficultés, notamment des tensions liées à la création d’un « rapport autochtone » faisant écho aux diverses perspectives, expériences et connaissances de populations autochtones du Canada, et à la définition du terme Autochtone. Dans le cadre de ce rapport, nous définissons ce terme de manière à englober les trois groupes distincts au Canada : les Premières Nations, les Inuit et les Métis. Nous reconnaissons les cultures distinctes qui existent sous le terme général Autochtone, la diversité entre ces groupes et au sein de ceux‑ci, ainsi que le fait que nos expériences des impacts des changements climatiques et de l’adaptation ne peuvent être exclues de l’ensemble vaste et diversifié de cultures, d’histoires, d’expériences et de langues des Premières Nations, des Inuit et des Métis aux quatre coins du pays. Ce principe s’applique également, dans la mesure du possible, aux Premières Nations, aux Inuit et aux Métis vivant dans les zones urbaines, qui représentent plus de la moitié de la population autochtone au Canada.

Par respect et par engagement à reconnaître cette diversité comme un élément central de notre travail, nous devons reconnaître nos limites à saisir pleinement la complexité des systèmes de savoirs, ainsi que les expériences des Premières Nations, des Inuit et des Métis à travers le Canada liées aux impacts des changements climatiques et l’adaptation. Le présent rapport et ses cinq messages clés visent plutôt à fournir un cadre pour orienter la prise en compte et l’inclusion des populations autochtones et de leurs systèmes de savoirs dans les discussions relatives aux changements climatiques. Ces discussions doivent se poursuivre directement avec les détenteurs de droits et de titres. Nous considérons ce rapport comme une étape initiale et essentielle pour les futures évaluations des changements climatiques menées par des Autochtones, ainsi que pour l’apport de changements aux mesures et aux politiques à l’échelle locale, provinciale, nationale et mondiale qui intègrent les Premières Nations, les Inuit et les Métis, ainsi que leurs systèmes de savoirs, leurs expériences et leurs perspectives.

Feuillage persistant violet stylisé et monochrome.

3.2

Citations, données probantes et méthodologies autochtones

La citation est une pratique d’évaluation qui privilégie certaines formes d’impact, de pertinence et d’importance (Ahmed, 2013). Dans ce rapport, notre équipe d’auteurs s’est efforcée de faire progresser les modes de connaissance autochtones dans le cadre d’une pratique souvent ancrée dans des idéologies extractives et principalement non autochtones. Celles‑ci donnent la priorité à la production de connaissances et, dans les contextes universitaires, à l’examen par les pairs pour la titularisation et la promotion (Todd, 2016; Lewis, 2012). Plus directement, les citations et les politiques qui y sont associées peuvent reproduire « […] le mythe populaire selon lequel la recherche est effectuée par des hommes anglophones, blancs et cis » (Liboiron, 2020, p. 97). En outre, les hiérarchies reproduites dans le monde universitaire favorisent souvent les connaissances écrites et générées par l’homme; ce qui reflète l’enracinement des connaissances et des pratiques coloniales (Burgess et coll., 2021; Younging, 2018; Simpson, 2017). Par conséquent, la richesse des traditions orales et visuelles et les connaissances intergénérationnelles conservées au sein des collectivités et par nos relations au-delà de l’humain sont souvent négligées (Kimmerer, 2013).

Le présent rapport s’appuie sur la documentation publiée et évaluée par les pairs, mais comprend également des citations d’Aînés, des études de cas, des références à des vidéos, des supports multimédias et des ouvrages en ligne, ainsi que des œuvres d’art et des témoignages. Nous adoptons ainsi une méthodologie décoloniale qui fait activement place aux peuples et aux voix autochtones (Ferrazzi et coll., 2019; Zavala, 2013; Smith, 2012). Notre travail s’inscrit largement dans un paradigme de recherche autochtone visant à permettre une recherche par les peuples autochtones qui soit pertinente et responsable du point de vue culturel (Kovach, 2021; Chiblow, 2020; Inuit Tapiriit Kanatami [ITK], 2019a, 2019b; Smith, 2012; S. Wilson, 2008). Ce paradigme de recherche oriente largement notre compréhension des « données probantes ».

En nous appuyant sur les ontologies (la nature de l’être) et les épistémologies (les théories de la connaissance) autochtones et en les incarnant, nous soulignons que les relations entre les humains et le monde naturel sont fondées sur des principes de réciprocité, de non-exploitation et de coexistence respectueuse (Coulthard, 2014). Nous donnons la priorité aux cinq « R » de la recherche autochtone axée sur la terre, la glace et l’eau : relations, respect, pertinence (« relevance », en anglais), réciprocité et responsabilité (Styres et Zinga, 2013). Dans l’ensemble, notre équipe d’auteurs a cherché à déconstruire les hypothèses dominantes qui sous-tendent les systèmes coloniaux de solutions aux changements climatiques en centrant la souveraineté autochtone sur la conception, la mise en œuvre et la rédaction de ce rapport2 (Neville et Coulthard, 2019).

3.3

Contexte et importance du rapport

Compte tenu de l’histoire, du contexte et de la trajectoire dangereuse de l’inaction climatique mondiale actuelle (Carr, 2022), il « […] n’est pas rationnel pour les populations autochtones de s’appuyer sur ces cadres économiques et politiques mondiaux, nationaux et régionaux pour assurer la justice climatique et un avenir durable » (McGregor et coll., 2020, p. 36). C’est pourquoi Assurer notre avenir : rapport sur la résilience autochtone est un document unique et indépendant qui reconnaît les peuples autochtones, leurs systèmes de savoirs et leurs perspectives distinctes. Cela est essentiel pour plusieurs raisons.

Premièrement, les connaissances, les perspectives et les expériences autochtones en matière de crises et de changements environnementaux sont souvent négligées dans les dialogues et les évaluations climatiques dominantes. Cet oubli mène à des échecs persistants dans le traitement des crises simultanées de la colonisation et de la dépossession (Zurba et coll., 2022; McGregor, 2019; Watt-Cloutier, 2015; Downing et Cuerrier, 2011). Cette négligence est souvent évidente dans les approches gouvernementales en matière de politique et d’analyse, qui sont ancrées dans des cadres sociaux et écologiques particuliers (p. ex., Indigenous Climate Action, 2021a). Le rapport de 2022 du groupe de travail II sur les conséquences, la vulnérabilité et l’adaptation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC, 2022) a été la première évaluation mondiale des changements climatiques à reconnaître le colonialisme (voir également la section 3.4). Notre rapport, en revanche, met l’accent sur les approches autochtones locales de la lutte contre les changements climatiques et sur les cadres de connaissance, d’existence et d’action qui les sous-tendent3.

Deuxièmement, la reconnaissance de la valeur égale des systèmes de savoirs des populations autochtones et la promotion d’une participation équitable et ouverte des peuples autochtones aux dialogues scientifiques et politiques occidentaux n’ont connu qu’une progression graduelle (Groupe d’experts sur l’adaptation et la résilience aux changements climatiques, 2018).

Troisièmement, lorsque les systèmes de savoirs autochtones ont été pris en compte dans les débats scientifiques et politiques occidentaux, cela a souvent été fait principalement par des chercheurs non autochtones qui, dans des circonstances particulières, ont marginalisé, mal interprété ou détourné des systèmes de savoirs qui n’étaient pas les leurs.

Le temps est venu pour les Autochtones d’exercer notre leadership et d’être désignés comme auteurs de nos travaux, et, par extension, d’inclure de manière plus appropriée nos systèmes de savoirs dans les évaluations, la recherche et les discussions sur les politiques relatives aux changements climatiques. Il est temps de créer notre propre espace au sein duquel nos systèmes de savoirs ne sont pas simplement inclus, mais sont prioritaires, activement intégrés et efficacement communiqués, comme le montrent des initiatives telles que le rapport Science du climat 2050 : faire progresser la science et le savoir sur les changements climatiques (Science du climat 2050) (Gouvernement du Canada, 2020a).

Ce cadrage reflète d’autres approches autochtones clés en matière de changements climatiques, telles que la Stratégie nationale inuite sur les changements climatiques (ITK, 2019a), la Stratégie nationale sur le climat de l’Assemblée des Premières Nations (2023), Métis Nation Climate Change and Health Vulnerability Assessment (JF Consulting, 2020), ainsi que la Stratégie sur les changements climatiques et la Carte d’action sur les changements climatiques de la région désignée des Inuvialuit [Inuvialuit Settlement Region Climate Change Strategy and Climate Change Action Map] (Société régionale inuvialuite, 2022). Le leadership climatique autochtone a été explicitement reconnu dans le plan climatique renforcé du gouvernement du Canada, Un environnement sain et une économie saine (Gouvernement du Canada, 2020b), qui reconnaît l’importance de l’autodétermination par et pour les peuples autochtones, ainsi que dans la première Stratégie nationale d’adaptation du Canada (Gouvernement du Canada, 2023). Cette stratégie fait des droits des Autochtones l’un de ses principes directeurs et comprend une annexe consacrée aux stratégies et actions autochtones en matière de changements climatiques.

3.4

Reconnaissance des répercussions du colonialisme

On ne saurait trop insister sur la manière dont les inégalités et les injustices historiques et actuelles résultant du colonialisme, ainsi que les politiques, la gouvernance et les lois imposées, aggravent les impacts des changements climatiques sur les populations autochtones (Funes, 2022; Huntington et coll., 2019; Arsenault et coll., 2018; Collins et coll., 2017). Ce n’est qu’en 2022, plus de trois décennies après sa création, que le GIEC a reconnu que le colonialisme était un facteur de changements climatiques : « La vulnérabilité des écosystèmes et des populations aux changements climatiques diffère considérablement d’une région à l’autre et à l’intérieur d’une même région (degré de confiance très élevé), en raison de schémas de développement socioéconomique croisés, de l’utilisation non durable des océans et des terres, de l’inégalité, de la marginalisation, et de schémas historiques et permanents d’inégalité tels que le colonialisme et la gouvernance (degré de confiance élevé) » (GIEC, 2022, p. 12).

Ce contexte est essentiel pour comprendre chaque message clé de notre rapport, en particulier celui concernant les atouts uniques des populations autochtones pour répondre aux changements environnementaux et climatiques (voir la section 5.0). Le colonialisme de peuplement et ses manifestations, telles que l’extractivisme, le racisme structurel et la discrimination, ont conduit à l’éloignement, à l’exclusion, au déplacement et au retrait forcé de Premières Nations, d’Inuit et de Métis de leurs territoires traditionnels et, par extension, de la prise en charge et de la prise de décisions liées à ces territoires. Cela a limité notre capacité à exercer notre autorité sur nos milieux de vie et a conduit à négliger les préoccupations que nous avons exprimées au sujet de la destruction des écosystèmes depuis l’arrivée des Européens dans les Amériques il y a plus de cinq siècles. Ce contexte comporte de nombreux éléments et volets que nous ne sommes pas en mesure d’aborder dans le cadre de ce rapport. Les changements climatiques doivent être considérés comme « intimement liés aux idéologies, systèmes et pratiques du colonialisme » et à la dynamique des « formes intensifiées de patriarcat, d’impérialisme scientifique occidental et de néolibéralisme agressif qui marginalisent les savoirs et pratiques autochtones en les considérant comme pertinents uniquement pour les peuples autochtones qui les détiennent » (Lewis et coll., 2020, p. 898). Sans analyser le colonialisme historique et actuel, nous risquons de perpétuer des approches qui continuent d’échouer (McGregor, 2019; Cameron, 2012). Essentiellement, le colonialisme de peuplement a sapé le droit des peuples autochtones à vivre dans de bonnes conditions. La plupart des évaluations traditionnelles des changements climatiques et de l’environnement naturel ne tiennent pas compte du colonialisme dans leurs analyses (Cameron et coll., 2022, 2019; Cameron, 2012).

Les peuples autochtones réaffirment leur autorité sur un éventail de questions, notamment la gouvernance et le contrôle de l’éducation, des soins de santé, de la recherche, des systèmes alimentaires, de l’eau et des ressources énergétiques. Ce travail est complexe, et les divisions constitutionnelles du Canada en matière de pouvoir et de compétence sur les peuples autochtones ont diverses incidences sur les Premières Nations, les Inuit et les Métis (voir l’encadré 2). Une approche fondée sur les distinctions, reconnaissant les droits, les intérêts, les priorités et les préoccupations des Premières Nations, des Inuit et des Métis, tout en respectant nos cultures, nos histoires, nos droits, nos lois et nos gouvernements uniques, est de plus en plus utilisée (Gouvernement du Canada, 2018; Gouvernement de la Colombie-Britannique, s.d.). Les femmes autochtones, en particulier, ont travaillé pendant des générations pour surmonter les répercussions uniques des structures patriarcales coloniales sur leurs vies et leurs collectivités, en s’efforçant de restaurer leurs relations avec le monde naturel et de participer à la gouvernance et à la prise de décisions politiques, y compris l’action climatique (Asselin et Basile, 2018).

La mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) et les multiples appels à l’action lancés par la Commission de vérité et réconciliation du Canada mettent l’accent sur les processus d’autochtonisation et de décolonisation, s’accompagnant de conséquences pour la recherche et l’action en matière de changements climatiques. La recherche et l’action décolonisées sur les changements climatiques sont ancrées dans des systèmes basés sur les connaissances locales, au sein desquels les perspectives, les connaissances et les méthodologies autochtones sont enracinées. Il est de plus en plus reconnu que la gouvernance, les systèmes de savoirs et le droit juridique des peuples autochtones sont essentiels pour soutenir et favoriser la capacité d’adaptation face aux changements climatiques (Deranger et coll., 2022; Reed et coll., 2021b; McGregor et coll., 2020; Cameron et coll., 2019; McGregor, 2017). Ce rapport vise à offrir une perspective décolonisante au dialogue actuel sur les changements climatiques au Canada en mettant l’accent sur les connaissances, les perspectives et les réalités autochtones.

Un banc de poissons verts monochromes de différentes tailles. Conçu par Hetxw'ms Gyetxw (Brett D. Huson).

3.5

Comment lire le présent rapport

L’ouvrage Assurer notre avenir : rapport sur la résilience autochtone, comme le reste de l’évaluation nationale des connaissances, est fondé sur des travaux existants. En nous appuyant sur cette base, ainsi que sur des mots, des récits, du support multimédia et des récits de cas présentant le travail actuel et en cours dans de nombreuses collectivités, nous souhaitons que l’ouvrage Assurer notre avenir : rapport sur la résilience autochtone soit utile dans les domaines de la recherche et de l’établissement de politiques, ainsi qu’au sein des collectivités. Nous utilisons des récits de cas particuliers issus des perspectives et des expériences de Premières Nations, d’Inuit et de Métis pour fournir des exemples concrets, en suivant une structure cohérente dans chaque section. Chaque cas commence par une réitération du message clé, suivie d’un paragraphe accessible résumant l’essence du message. Cela est suivi d’une introduction et de plusieurs sous-sections consacrées à l’examen de données justificatives.

3.6

COVID-19 et trois années exceptionnelles

Les répercussions profondes de la pandémie mondiale de COVID-19 sur nos collectivités ne peuvent être ni surestimées ni négligées dans le contexte de ce rapport (Richmond et coll., 2021; Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, 2020; ITK, 2020a). La pandémie de COVID-19 a submergé les administrations publiques et les collectivités des Premières Nations, des Inuit et des Métis, qui ont dû faire face à des cas actifs, des hospitalisations et des décès. Nous exprimons notre plus profond respect à ceux qui ont travaillé sans relâche dans nos collectivités; nous offrons notre soutien et nos condoléances à tous ceux qui ont été touchés par le virus; nous sommes conscients de vos difficultés et de vos pertes.

Les expériences uniques auxquelles les Premières Nations, les Inuit et les Métis ont été confrontés et continuent d’être confrontés en raison de la COVID-19 sont exacerbées par le colonialisme et ses répercussions structurelles sur nos collectivités. Il s’agit notamment de l’expulsion forcée de nos terres, eaux et territoires, du manque d’accès à l’eau potable et à l’assainissement, de logements surpeuplés et insalubres, de l’insécurité alimentaire et hydrique, de l’interruption de services communautaires essentiels et du sous-financement chronique des services médicaux, des installations et des transports. Ces facteurs touchent directement la santé (physique, mentale, spirituelle et émotionnelle), se répercutent sur le temps disponible et réduisent la capacité à répondre et à participer aux exigences du travail quotidien, aux activités extérieures et à d’autres enjeux critiques actuels, tels que les changements climatiques (Bowers et coll., 2021; Kenny, 2020). Malgré ces difficultés, les gouvernements des Premières Nations, des Inuit et des Métis ont réaffirmé leur compétence au cours des trois dernières années en mettant en place des frontières, des quarantaines strictes et des règles de dépistage pour les membres qui retournent dans leur collectivité, et en mobilisant des économies d’entraide et de soins dans les centres urbains.

Tout au long de la pandémie, nous avons constaté que l’on continue à mettre l’accent sur l’augmentation des activités industrielles et extractives et à les faciliter activement; ce qui continue à porter atteinte aux droits inhérents, issus des traités et protégés par la Constitution des Premières Nations, des Inuit et des Métis. Le concept de « rebâtir en mieux » et de « rétablir l’économie » peut ne pas répondre de manière adéquate à l’héritage structurel de la colonisation sur notre infrastructure, notre gouvernance et les modes de vie des Premières Nations, des Inuit et des Métis (Busby, 2021). La pandémie a fait ressortir la nécessité de disposer de données fondées sur les distinctions pour comprendre les besoins particuliers des peuples autochtones en matière de santé et d’économie et y répondre (Obed, 2020); ce qui aura des répercussions sur la gestion des crises futures et des impacts des changements climatiques.

Dans le cadre de l’élaboration du présent rapport, les répercussions combinées des événements survenus au cours de la période 2020‒2023 (notamment la pandémie de COVID-19, le nombre croissant de phénomènes climatiques extrêmes [en particulier le phénomène de rivière atmosphérique en Colombie-Britannique et les incendies de forêt en Colombie-Britannique, au Yukon, au Québec et en Alberta] et la « découverte » de tombes anonymes sur des sites d’anciens pensionnats indiens dans l’ensemble du pays) ont été fortement ressenties par l’équipe d’auteurs et se reflètent dans les messages clés de ce rapport. De nombreux membres de notre équipe ont été touchés par le stress et les bouleversements professionnels, familiaux ou de santé qui ont nécessairement pris le pas sur les réunions et la rédaction. Nos auteurs, qui sont parents, grands-parents, dirigeants communautaires, artistes, éducateurs, soignants, entrepreneurs et bien plus encore, ont tous été perturbés par la pandémie de COVID-19 et les événements exceptionnels des dernières années; les personnes vivant dans les collectivités nordiques, rurales et éloignées étant particulièrement touchés.

Malgré ces difficultés, nous considérons que le présent rapport illustre une perspective générale sur les répercussions particuliers des changements climatiques et les approches d’adaptation auxquelles les Premières Nations, les Inuit et les Métis sont confrontés au Canada. Il ne s’agit toutefois pas d’une représentation exhaustive de toutes les activités de leadership climatique entreprises par les citoyens, les administrations publiques et les organisations des Premières Nations, des Inuit et des Métis dans l’ensemble du pays. Une étude approfondie de ce leadership climatique doit être réalisée en partenariat avec les Premières Nations, les Inuit et les Métis.

Notes de bas de page

  1. Les rapports d’évaluation nationale des connaissances sont référencés en utilisant un format court particulier, selon lequel chaque citation est suivie du numéro de chapitre correspondant. Ce format vise à diriger les lecteurs vers des chapitres précis pour obtenir de plus amples détails. Pour les citations complètes de ces rapports, veuillez consulter l’annexe 1. Les lecteurs sont encouragés à utiliser ces citations de chapitres pour obtenir des références plus précises, le cas échéant.RCCC : Rapport sur le climat changeant du Canada REN : Rapport sur les enjeux nationaux RPR : Rapport sur les perspectives régionales SCCC : La santé des Canadiens et des Canadiennes dans un climat en changement RRA : Assurer notre avenir : rapport sur la résilience autochtone
  2. Des ressources sur les ontologies, épistémologies et méthodologies autochtones sont facilement accessibles (p. ex., Kovach, 2021; McGregor et coll., 2018; Wilson, 2008).
  3. Les populations autochtones continuent de remettre en question les notions étatiques et les débats politiques de diverses manières historiques et contemporaines. Par exemple, le Nunavut, territoire canadien doté d’un gouvernement public, est souvent confronté à des approches politiques fédérales descendantes en raison de sa structure de pouvoir. Toutefois, les Inuit, qui constituent la population majoritaire au Nunavut, exercent également une influence ascendante significative en tant que détenteurs de droits et de titres. Alors que l’approche politique descendante s’applique universellement à tous les citoyens, l’approche ascendante est plus ciblée et aborde des questions politiques précises.
Suivante

Introduction