Évaluation des services des marais salés naturels dans l’estuaire de la Musquash

En 2018, Conservation de la nature Canada (CNC) a reçu un financement par l’entremise du programme de base de Pêches et Océans Canada pour évaluer les services fournis par les zones humides côtières dans l’estuaire de la Musquash et d’autres régions près de Saint John, au Nouveau-Brunswick. Situé dans la baie de Fundy et à seulement 15 minutes de Saint John, l’estuaire de la Musquash est l’un des derniers estuaires en bonne santé et la plus grande zone de conservation de CNC du Canada atlantique. Les terres entourant l’estuaire de la Musquash sont un havre pour bon nombre de plantes et d’animaux indigènes. Elles jouent un rôle essentiel pour atténuer les effets des changements climatiques en réduisant les impacts de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion côtière, tout en séquestrant le carbone. En plus de ses attributs naturels, l’estuaire de la Musquash est un élément important du patrimoine de la région. On croit que des groupes autochtones auraient établi des campements saisonniers le long des rives de l’estuaire. Aujourd’hui, les communautés côtières avoisinantes continuent d’utiliser l’estuaire pour la pêche et les loisirs. L’estuaire de la Musquash est vraiment unique en son genre, car il est influencé par les marées, mais protégé de la pleine mer. Cet estuaire est unique parmi les estuaires de la baie de Fundy à cause de sa taille, de l’étendue de ses marais salés et de son état naturel. Il s’agit du plus grand estuaire toujours intact sur le plan écologique dans la baie de Fundy. Ses vasières, marais salés, tourbières d’eau douce et forêts abritent des plantes, des animaux ainsi qu’une faune aquatique et une flore marine uniques. De nombreux animaux se trouvent ici, notamment le faucon pèlerin, le lynx roux, l’orignal, le cerf et le phoque commun. L’estuaire de la Musquash a été la première zone fédérale de protection marine du Nouveau-Brunswick désignée en 2006.

Comprendre et évaluer les impacts

Le personnel de CNC a utilisé le protocole sur les services écosystémiques des terres humides pour le Canada atlantique (WESP-AC) pour définir rapidement les fonctions des écosystèmes. Le protocole normalisé comprend une évaluation préliminaire à l’ordinateur ainsi qu’une visite sur le terrain. Les données recueillies lors de la visite sur le terrain sont l’inventaire des espèces de plantes, l’inventaire des espèces de plantes exotiques et envahissantes, l’identification des espèces en péril ou des habitats convenables pour ces espèces, la texture du sol, les mesures de la salinité de l’eau mouvante, l’étendue des inondations des zones humides pendant les périodes de marées annuelles et mensuelles les plus élevées, l’étendue du couvert végétal à marée basse, les limites des zones humides et les photographies de référence à des points cartographiés dans les zones humides.

Certains des services écosystémiques évalués, notamment l’interception des ondes de tempêtes et la stabilisation des zones humides, établissent comment les zones humides réagiront aux impacts des changements climatiques, comme l’élévation du niveau de la mer, des inondations accrues et des tempêtes plus sévères.

Dans la baie de Fundy, plus de 85 % des marais salés originaux ont été altérés par l’être humain au cours des 300 dernières années. CNC cherche également à conserver autant de zones humides que possible, car elles jouent un rôle essentiel dans le stockage du carbone.

Déterminer les actions

En 1998, le Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick (CCNB), avec le soutien de la Fundy North Fishermen’s Association, a proposé l’estuaire de la Musquash et la zone intertidale avoisinante comme candidats de zone de protection marine (ZPM) en vertu de la Loi sur les océans. En 2006, la ZPM de l’estuaire de la Musquash et la zone intertidale administrée (ZIA) ont officiellement été désignées comme zones protégées. L’état de zone protégée de l’estuaire reflète les efforts collaboratifs de la communauté et du gouvernement. Pêches et océans Canada (MPO), au nom du gouvernement du Canada, est responsable de la gestion de la ZPM et de la ZIA, en collaboration avec le comité consultatif de la ZPM de l’estuaire de la Musquash (CCEM). Les membres du CCEM proviennent de ministères, d’organisations non gouvernementales, d’industries, de Premières Nations et de groupes communautaires qui s’intéressent à la ZPM et à la ZIA. La conservation et la protection de l’écosystème étaient les principaux objectifs de la gestion de l’estuaire. Les objectifs de conservation suivants ont été établis pour les atteindre :

  • Maintenir la productivité des espèces exploitées.
  • Maintenir la biodiversité des espèces individuelles ainsi que des communautés et populations dans les divers écotypes.
  • Protéger les habitats, y compris les propriétés physiques et chimiques de l’écosystème, en assurant la qualité de l’eau et des sédiments.

Ces objectifs étaient fondés sur les principes directeurs suivants :

  • Gestion intégrée : Cela désigne la planification et la gestion des activités humaines de manière exhaustive en tenant compte de l’éventail complet d’intérêts et d’objectifs environnementaux, sociaux, culturels, économiques et institutionnels.
  • Approche écosystémique : Cela comprend la gestion des activités humaines afin de maintenir ou de restaurer les composants et fonctions de l’écosystème selon des échelles temporelles ou spatiales appropriées.
  • Approche de précaution : Il s’agit d’une évaluation et d’un processus décisionnel qui penchent du côté de la prudence; une approche utilisée en cas de grande incertitude scientifique.
  • Prise de décisions fondée sur les connaissances : Des mesures de gestion qui se fondent sur les meilleurs renseignements scientifiques et sur les connaissances écologiques traditionnelles disponibles.
  • Collaboration et administration : La planification de la gestion doit être à la fois inclusive et transparente. Elle doit aussi être appuyée, autant que possible, par toutes les organisations et personnes touchées.
  • Planification et gestion adaptatives : La conception et la gestion de la ZPM seront évaluées et adaptées au besoin pour en assurer l’efficacité dans le cadre de l’atteinte des objectifs.

Mise en oeuvre

CNC a d’abord entrepris ses travaux de conservation en 2000. Cette organisation a depuis protégé 2 300 hectares (5 600 acres) de marais, de forêts côtières et de plages de galets dans l’estuaire. Ces zones sont des endroits sûrs pour que les animaux sauvages puissent se nourrir, trouver un refuge, se reproduire et élever leurs petits. Les objectifs de conservation ont été atteints en établissant les priorités de gestion et en les abordant grâce à la mise en œuvre des mesures de gestion. Voici les priorités :

  • Continuer de susciter l’engagement des responsables de la réglementation aux niveaux fédéral et provincial pour veiller à ce qu’ils soient conscients de leurs rôles et responsabilités dans la gestion de la ZPM et de la ZIA.
  • Favoriser l’éducation et la sensibilisation de la population, et promouvoir la conservation.
  • Gérer les activités dans la ZPM.
  • Surveiller la santé et l’efficacité de la gestion de la ZPM et en rendre compte.

En utilisant le protocole sur les services écosystémiques des terres humides pour le Canada atlantique (WESP-AC), CNC a mené à ce jour de nombreux levés. Le protocole WESP-AC est une méthode normalisée pour évaluer rapidement les fonctions de tous les types de zones humides dans le Canada atlantique. L’été, le projet offre aussi aux stagiaires des possibilités d’apprentissage pratique sur les zones humides et leurs services uniques.

Résultats et suivi des progrès

Les règlements touchant la ZPM de l’estuaire de la Musquash interdisent la tenue d’activités qui dérangent, endommagent, détruisent et éliminent de cette zone des organismes marins vivants ou toute partie de leur habitat, à moins d’exception dans les règlements ou d’une approbation par le Ministère. Un cadre de travail a été élaboré pour évaluer l’efficacité de la gestion de la ZPM et de la ZIA dans l’estuaire de la Musquash pour atteindre ces objectifs. Ce cadre de travail tient compte de 49 indicateurs qui ont été conçus pour aborder les engagements en matière de gestion selon les six catégories suivantes :

  1. Interactions des intervenants (17 indicateurs)
  2. Éducation, conservation et sensibilisation (7 indicateurs)
  3. Recherche, surveillance et autres activités permises (8 indicateurs)
  4. Planification (5 indicateurs)
  5. Capacité (4 indicateurs)
  6. Mise en application et conformité (8 indicateurs)

Le cadre de travail comprenait un formulaire d’évaluation principal et un questionnaire du CCEM. Le formulaire d’évaluation englobait 49 indicateurs (principalement composés d’une question associée à quatre choix de réponse, de zéro à trois points, ainsi que de plusieurs questions ouvertes), avec des espaces pour fournir plus d’information, des recommandations et les sources de données utilisées pour répondre à chacune des questions. Les 49 indicateurs du formulaire d’évaluation se classaient dans six catégories de gestion correspondant à celles indiquées ci-dessus.

Prochaine(s) étape(s)

En allant de l’avant, CNC souhaite explorer comment intégrer l’outil WESP-AC dans un programme de surveillance des zones humides à long terme afin d’évaluer les changements touchant les services à l’avenir. Ces efforts pourraient également permettre de caractériser les répercussions sur les services des zones humides au fil du temps découlant des changements de l’utilisation des terres (p. ex., proximité des personnes et développement). Enfin, CNC examine comment utiliser les résultats de ce projet pour aider les propriétaires de terres locaux à comprendre les avantages des zones humides et des types de services qu’ils reçoivent des écosystèmes sains et intacts. La conservation peut être un puissant outil dans la protection des zones humides côtières. En veillant à la conservation des forêts et des marais dans l’estuaire de la Musquash, CNC vise à permettre à la nature de stabiliser la ligne côtière, de conserver l’eau pluviale, de prévenir les inondations et de stocker le carbone. Tous ces processus sont importants pour s’adapter aux changements climatiques.

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