Changements climatiques dans le complexe de la baie d’Hudson : possibilités et vulnérabilités pour les activités maritimes au Port de Churchill

En 2016, des membres du Centre des sciences de l’observation de la Terre (CSOT) de l’Université du Manitoba ont publié une évaluation des impacts du climat sur le Port de Churchill qui examine les conséquences de la hausse des températures, de l’augmentation des vents et des changements touchant les glaces de mer sur le transport maritime dans la région de l’Arctique, avant de présenter un aperçu des vulnérabilités et des possibilités connexes. Le document se fonde sur un examen approfondi de la littérature scientifique pertinente, sur un examen des projets en cours et récents du CSOT ainsi que sur une série d’entrevues avec des représentants des principaux intervenants du Port de Churchill. Les renseignements recueillis auprès de ces diverses sources ont permis d’établir des vulnérabilités et des possibilités liées au climat pour le Port de Churchill. Les vulnérabilités au Port de Churchill se présentent sous forme d’interruptions accrues causées par les vents, de manque de données hydrographiques et de services limités de recherche et de sauvetage de la Garde côtière canadienne. Les occasions cernées visaient surtout la possibilité de prolonger la saison de navigation en raison du réchauffement du climat et des changements touchant les glaces de mer. Parmi les avantages associés à une saison prolongée, notons l’introduction possible de nouvelles exportations et une hausse des exportations actuelles des biens. Une fois les vulnérabilités et les possibilités établies, les auteurs ont souligné un certain nombre de programmes préliminaires et de possibilités de recherche à poursuivre afin de veiller davantage à ce que les activités accrues d’expédition au Port de Churchill se déroulent de manière sécuritaire et responsable. Parmi les programmes mis de l’avant, notons ceux qui visent à clarifier et à délimiter les corridors de transport dans le nord ou à réglementer l’introduction d’espèces non indigènes dans les eaux de l’Arctique. Enfin, les auteurs suggèrent qu’une étude plus approfondie de la fréquence des tempêtes et des vents dans le complexe de la baie d’Hudson soit menée. La section « prochaines étapes » ci-dessous présente un examen plus détaillé des mesures proposées et des secteurs des recherches futures.

Comprendre et évaluer les impacts

L’étude a utilisé des données sur le climat provenant de diverses sources, notamment d’Environnement Canada et des National Centers for Environmental Prediction ainsi que des documents universitaires. Les auteurs ont également tenu compte des publications en cours et récentes du Centre des sciences de l’observation de la Terre (CSOT). Pour compléter l’analyse de données, des entrevues ont été menées auprès des représentants des principaux intervenants du Port de Churchill afin d’obtenir des commentaires sur les changements possibles aux infrastructures et aux activités attribuables au climat changeant. Les résultats des entrevues seront analysés en profondeur dans la section intitulée « déterminer les mesures ». L’analyse des données sur les températures moyennes pour la région a révélé de nombreuses tendances qui auront des répercussions importantes sur le commerce maritime à Churchill, au Manitoba, notamment une hausse prévue de la température d’environ 1 °C par décennie entre 2012 et 2061. Les hausses des températures observées et prévues se traduisent par des changements au niveau de la formation et de la rupture des glaces de mer, et par la possibilité de prolonger considérablement la saison de navigation. Les données supplémentaires prises en compte prévoient également une prolongation de la saison habituelle des tempêtes, soit d’août à décembre, jusque dans les mois d’hiver en raison des conditions de navigation en eau libre plus longues. L’analyse des données historiques des National Centers for Environmental Prediction (NCEP) ainsi que des données des postes d’observations météorologiques d’Environnement Canada dans la région révèle que la vitesse des vents pendant la saison de navigation (de juillet à novembre) a augmenté depuis 1970, tandis que les projections suggèrent que les interruptions aux activités du port en raison des vents pourraient devenir plus communes.

Déterminer les actions

Dans le cadre du projet, les auteurs ont cerné d’éventuelles possibilités au complexe de la baie d’Hudson. Ces possibilités ont été mises en évidence grâce à une analyse de données pertinentes sur le climat et à des entrevues menées auprès des représentants des principaux intervenants du Port de Churchill entre 2014 et 2016. Enfin, un groupe de travail fédéral-provincial sur l’avenir de Churchill a aussi fourni de précieuses informations pour déterminer quelles sont les mesures qui doivent être prises. Les projections climatiques indiquent une hausse des températures, une formation plus lente et une disparition plus rapide des glaces de mer, offrant ainsi une plus longue saison de navigation en eau libre. Les intervenants interviewés ont donné leurs opinions sur la manière dont les changements climatiques pourraient toucher les opérations. D’abord, les personnes interrogées anticipent une pression imminente de certains armateurs pour prolonger officiellement la saison de navigation. Elles constatent également la possibilité d’augmenter les expéditions de céréales et les activités de réapprovisionnement (transport de cargaisons sèches vers de nombreux emplacements au Nunavut), alors que les routes deviennent plus dégagées. Les intervenants prévoient aussi une nouvelle activité d’expédition liée à la potasse et même au pétrole, ainsi que l’introduction d’importations au complexe. La difficulté inhérente à prédire les moments « typiques » de gel et de rupture des glaces de mer est un facteur prépondérant qui pourrait compliquer l’établissement de mesures, car ceux-ci varient d’une année à l’autre et à long terme.

Résultats et suivi des progrès

L’évaluation des impacts du climat pour le Port de Churchill a mis en lumière un certain nombre de défis qui pourraient devenir plus apparents à l’avenir au complexe de la baie d’Hudson. En premier lieu, les auteurs ont déterminé qu’il y a un manque d’information hydrographique détaillée et à jour dans la région concernant les zones se trouvant à l’extérieur des routes de navigation bien établies. Étant donné ce manque d’information, le Service hydrographique du Canada (SHC) ainsi que la Garde côtière canadienne (GCC) envisagent de développer des « corridors maritimes de transport dans le nord » pour améliorer la sécurité des activités d’expédition. Par la suite, l’étude a également déterminé que les écosystèmes de l’Arctique, dont le complexe de la baie d’Hudson, sont particulièrement sensibles aux espèces envahissantes. Étant donné l’augmentation possible de la circulation maritime à venir dans le secteur, la probabilité d’introduire des espèces non indigènes (dans les eaux de ballast ou attachées aux coques de bateaux) augmentera. Les auteurs notent qu’en raison de cela, le Secrétariat canadien des avis scientifiques a exprimé le besoin de mettre en place un système de surveillance et d’atténuation. L’étude souligne également que la Garde côtière canadienne a actuellement de la difficulté à offrir suffisamment de services de recherche et de sauvetage dans la région de l’Arctique, une situation qui risque de s’aggraver à cause de l’augmentation de la circulation maritime dans la région. Finalement, sur le plan général, les auteurs notent que « le défi pour le Port de Churchill sera de tirer parti de l’ouverture de l’Arctique qui est en cours, tout en naviguant de manière sécuritaire et durable dans les nombreux changements touchant l’environnement arctique qui sont occasionnés par les changements climatiques et le développement accru. »

Prochaine(s) étape(s)

L’article comprend deux sections distinctes établissant les éventuelles prochaines étapes selon les observations découlant du projet. Celles-ci visent les vulnérabilités et les possibilités liées au climat. Dans la section portant sur les vulnérabilités, les auteurs indiquent qu’il sera important à l’avenir de remédier au manque d’information concernant les aspects climatiques dans le complexe de la baie d’Hudson. Tout particulièrement, il y a actuellement un manque d’information liée aux conditions météorologiques défavorables et aux processus de formation des glaces. Une compréhension plus approfondie des fréquences de tempêtes actuelles et futures, de même qu’une étude plus détaillée des vents dans le complexe en général et près des sites de déchargement en particulier faciliteront davantage les opérations portuaires. Les risques liés aux glaces dans l’ensemble du complexe et la formation de glace dans l’estuaire de la rivière de Churchill auront également des répercussions sur les activités de transport maritime pour ce qui concerne le calendrier de chaque saison de navigation ainsi que la sécurité des déplacements. Une étude de ces points permettrait d’avoir une meilleure compréhension du processus dynamique de la formation de crêtes de glace et du chevauchement de la couverture de glace qui agissent pour renforcer les glaces de mer. En ce qui concerne les possibilités, elles sont nombreuses à viser essentiellement une prolongation de la saison de navigation. Afin de tirer parti de l’éventuel prolongement de la saison navigable (qui aurait un effet positif sur le réapprovisionnement des communautés éloignées), les auteurs soulignent le besoin de miser sur les données probantes présentées dans cet article pour s’assurer que les observations qui favorisent le prolongement de la saison navigable en eau libre sont aussi solides que possible. De plus, ils proposent d’améliorer les prévisions visant les glaces de mer afin de rehausser la sécurité dans le complexe de la baie d’Hudson. L’étude préliminaire indique que de récents progrès permettraient d’établir des prévisions précises concernant les glaces de 6 à 8 mois à l’avenir (contrairement aux prévisions actuelles de 30 jours fournies par le Service canadien des glaces).

Ressources

Lien vers l’étude de cas complète (en anglais seulement)

Ressources additionnelles:

  • Comprenez davantage comment les informations climatiques peuvent être appliquées dans la prise de décision en explorant le module Transport sur DonnéesClimatiques.ca