Projet Rés-Alliance

Depuis 2016, le projet Rés-Alliance du (ROBVQ) regroupe des dizaines de municipalités du Québec dans une communauté de pratique afin de renforcer leur résilience face aux changements hydroclimatiques.

Le Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) a pour mission de rassembler les organismes de bassins versants (OBV) de la province pour favoriser la gouvernance de l’eau dans le cadre de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant. Considérant que les changements climatiques risquent de modifier les régimes hydriques de la province, le regroupement a décidé de lancer cette communauté de pratique destinée spécifiquement aux petites et moyennes municipalités afin de renforcer leurs capacités d’adaptation aux nouvelles réalités climatiques qui affectent la gestion des ressources en eau. De 2017 à 2019, les collectivités leaders de huit territoires d’OBV ont réalisé des processus simultanés pour se doter de plans d’adaptation. Cette démarche a servi d’exemple pour d’autres organisations municipales qui se sont ensuite jointes à la communauté de pratique. Ce sont 34 collectivités qui, à ce jour, se seront engagées dans le projet et peuvent s’inspirer des démarches entreprises. Une grande partie de la documentation produite par les différentes communautés, comme l’évaluation de la vulnérabilité par rapport aux enjeux hydriques spécifiques à leurs territoires ou leurs plans d’action a été diffusée auprès du grand public.

Comprendre et évaluer les impacts

Financée par le Fonds vert dans le cadre d’Action-Climat Québec, un programme lié au Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques, l’initiative Rés-Alliance visait à renforcer les capacités des collectivités locales vis-à-vis les impacts des changements climatiques sur les régimes hydriques et les ressources en eau. Les deux principales problématiques identifiées dans le cadre de la Rés-Alliance par les collectivités participantes sont les inondations et la protection des sources d’eau potable.

Afin de soutenir autant que possible les municipalités dans cette démarche, le ROBVQ est allé chercher le soutien de ressources scientifiques spécialisées en changements climatiques en provenance d’une variété de secteurs, dont l’hydrologie, l’engagement communautaire, l’aménagement du territoire, l’économie, etc. Ceux-ci ont formé un comité de veille scientifique qui commentait la pertinence des différentes étapes du projet, mais pouvait aussi servir de ressources selon les enjeux étudiés et discutés par les collectivités. Le consortium de climatologie Ouranos a d’ailleurs été impliqué dès les premières étapes de la conception du projet.

Parmi les différentes collectivités participant au projet, huit ont été sélectionnées pour réaliser des cycles complets de plan d’adaptation aux changements climatiques, c’est-à- dire un portrait, un diagnostic et un plan d’adaptation de leur communauté. Les portraits ont été produits tôt dans le cycle de projet, en 2017. Ceux-ci comprennent une définition du système à l’étude, une analyse du réseau social, ainsi que l’identification des facteurs d’exposition et de sensibilité du système et les mesures de compensation existantes.

Déterminer les actions

Pour créer la communauté de pratique, le ROBVQ a déterminé trois niveaux de participation; le premier niveau est celui des collectivités leaders, le deuxième niveau est celui des OBV et de leurs membres et, finalement, le troisième est celui des participants occasionnels.

Les huit collectivités leaders forment le cœur du projet, en réalisant une démarche complète d’élaboration de plans d’adaptation aux changements climatiques de leur ressource en eau. Comme ces plans étaient thématiques, ces collectivités ont ciblé des enjeux spécifiques liés à la gestion hydrique pour l’évaluation de la vulnérabilité. Dans la plupart des cas, le manque (sécheresse) ou l’excès (inondations) d’eau était l’enjeu principal, mais certaines communautés ont aussi ciblé des enjeux locaux spécifiques, par exemple la qualité de l’eau et les ressources de saumon dans le bassin versant de Matapédia-Restigouche. Ces communautés ont donc réalisé un portrait de leur territoire au regard d’une problématique locale spécifique, un diagnostic incluant une évaluation de leurs vulnérabilités actuelles et futures en considérant les impacts des changements climatiques, et finalement, un plan d’adaptation répondant aux enjeux de leur territoire identifiés dans les étapes précédentes.

Mise en oeuvre

Cette démarche de planification a servi d’exemple pour la vingtaine d’autres organisations municipales qui se sont jointes à la communauté de pratique. À titre d’exemple, l’OBV Matapédia-Restigouche (OBVMR) a fait partie du groupe de communautés leaders ayant réalisé un plan d’adaptation aux changements climatiques. Ce système de bassin versant en particulier est affecté par une dégradation de la qualité de l’eau liée aux pratiques agricoles et à la gestion des eaux pluviales urbaines, ce qui affecte l’habitat des saumons de l’Atlantique. Les municipalités sur le territoire de gestion de l’OBV ont donc réalisé un diagnostic qui établit la vulnérabilité du territoire hydrique par un portrait de l’impact des activités actuelles sur le territoire et des actions mises en œuvre pour en limiter les effets négatifs. L’évaluation de la vulnérabilité s’est faite en additionnant l’exposition (l’aménagement du territoire), la sensibilité (les besoins des saumons en termes d’habitat), le risque (l’apport en sédiments urbain) et l’adaptation (mesures entreprises par les communautés pour diminuer les risques). Cette évaluation a permis de produire un scénario probable d’évolution de la problématique à partir de plusieurs facteurs physiques et humains, dont les informations provenaient des savoirs locaux et de la documentation régionale disponible.

Cette première étape a permis par la suite de déterminer la vulnérabilité actuelle et future des habitats aquatiques situés en milieu urbain, pour élaborer trois scénarios qui combinent à la fois des facteurs humains de développement du territoire et de projections climatiques (horizon 2041-2070 et 2071-2100); soit probable, possible et souhaité.

Un plan d’action formel n’a toujours pas été publié à ce jour, mais des outils ont été co-élaborés pour favoriser une cohabitation pérenne entre le saumon et les zones habitées tels qu’un cadre pour une politique de gestion durable des eaux, un recueil pour la mise en œuvre, ainsi qu’une modélisation pour prioriser les aires de drainage urbaines.

Résultats et suivi des progrès

Cette initiative a permis de sensibiliser les municipalités aux impacts de certaines décisions en aménagement du territoire et gestion de l’eau, ainsi que de faire émerger une compréhension commune des défis et pistes d’action prioritaires pour soutenir la résilience des communautés. Au final, ce sont 31 municipalités (locales et régionales), réparties au sein de 12 régions administratives différentes ainsi que deux organismes et une communauté autochtone qui se sont formellement engagés dans le projet. Il est possible de constater que sept des huit communautés leaders sont toujours actives et mobilisées pour la mise en œuvre de leur plan d’adaptation. On note par ailleurs une sensibilité et une autonomie accrues des acteurs locaux et régionaux en matière d’adaptation. Un autre bénéfice est que cette démarche est aujourd’hui éprouvée et reproductible partout dans la province, notamment dans les municipalités rurales ou semi-urbaines.

Le projet a produit une grande quantité de matériel, dont une grande part est disponible au public général. En plus de documents spécifiques comme les plans d’adaptation des communautés « leaders », des outils de communications variés tels que des infolettres, des capsules vidéo, des webinaires, des études de cas et même des épisodes de podcast ont été produits. Certains outils techniques comme des grilles d’évaluation ont aussi été publiés sur le site web de Rés-alliance. Une activité-phare du projet a aussi été la tenue du Grand Forum des communautés résilientes en 2019, qui combinait différentes formes de présentations et un format de programmation original, combinant des présentations traditionnelles de courte durée, des ateliers participatifs, des panels de discussions et ainsi que des discussions ouvertes. La plupart des OBV participants ont d’ailleurs publié sur leurs propres sites internet les documents résultants de leur démarche, par exemple l’OBVMR.

Prochaine(s) étape(s)

Après cette première phase de travail, le résultat le plus concluant est la mobilisation des communautés. Citoyens et associations de la société civile, municipalités locales et régionales, experts gouvernementaux et académiques et entreprises privées ont tous contribué à développer des plans d’adaptation reflétant leurs réalités régionales et bénéficiant de l’acceptabilité des membres de la communauté. Cette démarche coconstruite aura permis l’émergence d’une compréhension et d’une vision communes des défis auxquels font face les communautés et des pistes d’action prioritaires pour renforcer leur résilience. Des travaux en cours de réalisation ont permis de constater que cette démarche aura engendré une utilisation accrue des connaissances scientifiques et des données climatiques pour soutenir le choix de stratégies d’adaptation.

Les travaux de mise en œuvre des plans d’adaptation se poursuivent dans les communautés leaders et les prochaines étapes consisteraient à en faire le suivi, l’évaluation, un ajustement en continu et poursuivre la mise en œuvre. Il est attendu que de nouvelles communautés se joignent à la Rés-Alliance pour déployer des démarches semblables sur leurs territoires.

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