Le projet Nos milieux de vie ! Retour sur les premières phases d’une expérimentation de transition dans Rosemont–La Petite-Patrie

Ce document présente une expérimentation de transition via une approche de recherche-action, pour tenter de s’adapter aux changements climatiques. Le projet « Nos milieux de vie » est coordonné par la Coop Carbone et Solon a lieu dans 4 milieux de vie pilote de Montréal et Québec, d’octobre 2016 à novembre 2018. L’objectif de cet article est de présenter le projet et de rendre compte des apprentissages effectués dans les premières phases du projet et des adaptations à la démarche des expérimentations de transition auxquelles elles ont donné lieu. À travers ce travail quatre apprentissages principaux ressortent : le rôle crucial d’un organisme de médiation, l’existence de temporalités diverses au sein du projet, l’importance de s’adapter aux demandes et aux besoins des participants et, enfin, l’existence de déterminants sociaux de la transition écologique. Les projets abordés proposent de lutter contre les changements climatiques en misant sur le potentiel d’implication citoyenne par et pour la mise en place de projets collectifs locaux en énergie et mobilité.

Comprendre et évaluer les impacts

1. Création du comité de pilotage, évaluation et identification des milieux de vie

Pour cela les auteurs ont procédé à l’élaboration d’une grille de 10 critères (permettant d’évaluer des aspects matériels, des aspects sociaux et des aspects organisationnels) visant à rendre comparables différents milieux de vie afin d’évaluer leur potentiel pour mettre en œuvre le projet. Le comité a entrepris de documenter 11 milieux de vie sur la base de ces 10 critères. Ces 11 milieux de avaient été suggérés par divers acteurs locaux (communautaires et institutionnels). Les 11 fiches de milieu de vie ont été analysés en tenant compte de cinq « cibles » : 1) un certain degré de mobilisation citoyenne démontrant une capacité de prise en charge de projets ambitieux et structurants; 2) une diversité des profils socioéconomiques; 3) la diversité dans l’accès à la mobilité collective; 4) la diversité de la vitalité commerciale; 5) la présence d’autres conditions facilitantes (support communautaire, présence d’institutions, initiatives déjà en cours, etc.).Cette démarche a conduit au choix de 2 secteurs d’intervention — Bellechasse et Masson Est (présentés plus bas) — ayant des profils à la fois différents et prometteurs.

 

Déterminer les actions

2. Mobilisation des deux milieux de vie et développement de visions d’avenir désirable : rejoindre et mobiliser les citoyens et les parties prenantes des deux milieux de vie et, d’autre part, à amorcer la coconstruction d’une vision d’avenir désirable du milieu de vie.

Poursuite d’une analyse du diagnostic et des motivations des participants à s’engager dans le projet. Concrètement, les actions proposées par les participants s’orientent vers quatre éléments :

  1. Mieux communiquer pour favoriser l’inclusion au milieu de vie: Les activités proposées devraient ainsi être inclusives; elles devraient miser sur « l’hétérogénéité du quartier » et adapter le message aux différents groupes: ex présenter le projet dans les écoles, « faire du porte-à-porte chez nos voisins », fréquenter les activités de ruelle des uns et des autres, amener « nos familles » aux rencontres, créer un groupe Facebook, etc.
  2. Animer le milieu de vie: surtout de nature culturelle et artistique ex: la projection de « films inspirants », une exposition dans les cafés du milieu de vie de photographies sur les ruelles et les gens, la participation à des journées comme le « resto day », l’organisation d’un club de pétanque de ruelle, voire même l’organisation d’un festival local auquel les commerçants du milieu de vie pourraient participer.
  3. Aménager le milieu de vie: ex fermer des ruelles et petits aménagements pour rendre le milieu de vie plus convivial ex l’installation dans les jardins de chaises, 4-développer une économie de partage d’objets et de ressources: ex le partage de voitures, l’implantation de frigos communautaires et même la mise en place d’une « remise à outils en location inter-ruelles ».

Mise en œuvre

3. Sélection de projets et mise en œuvre

Suite à l’élaboration des visions d’avenir désirable et aux apprentissages effectués dans les deux premières phases, le comité
de pilotage a déterminé qu’il fallait s’attarder plus longuement à la démarche substantive afin de favoriser l’émergence de projets. La démarche visant à élaborer des visions d’avenir désirables des milieux de vie donne lieu à un certain décalage de substance entre la formulation de départ du projet et la coconstruction effective du milieu de vie. Ce décalage rend visible l’existence de déterminants sociaux de la transition écologique qu’il conviendra de
théoriser et d’étudier davantage dans la suite du projet NMV et dans d’autres projets.

Les participants de Masson Est ont établi un « comité de voisins » qui continuent à se mobiliser aujourd’hui, alors que ceux de Bellechasse ont continué à tenir des « mercredis collectifs » pour discuter des enjeux du milieu de vie. Il convient de se demander si cette mobilisation pourra s’inscrire dans une perspective de transition écologique et de lutte contre les changements climatiques au-delà des intentions.

Résultats et suivi des progrès

4. Évaluation et transfert

Quatre apprentissages principaux :

  1. Le rôle crucial de Solon comme organisme de médiation:Solon assume une posture de médiation sous plusieurs angles : entre les participants-citoyens et les chercheurs, entre les milieux de vie et les autres partenaires du projet, entre la démarche processuelle et l’élaboration de projets locaux, etc. Cette présence dynamise les liens entre les acteurs et est sécurisante pour l’ensemble des partenaires.
  2. L’existence de 3 temporalités au sein du projet: le temps des participants est compté, puisqu’il est pris sur des plages horaires de soirée et de fin de semaine; le temps du projet est structuré par les phases de la démarche processuelle et le temps de la recherche est peut-être le plus irrégulier.
  3. L’importance de s’adapter aux demandes et aux besoins des participants:les participants savent identifier des problèmes très immédiats dans leur milieu de vie, ex la sécurité et la propreté, mais ils réfléchissent aussi à des enjeux d’intérêt plus général.
  4. L’existence de déterminants sociaux de la transition écologique: le besoin de sécurité, la recherche du lien social et le désir d’inclusion, sont de nature à faire en sorte qu’un projet soit adopté par les citoyens qui se l’approprient, ou simplement rejeté.

Prochaine étapes

De nouveaux financements récemment obtenus et les apprentissages tirés du projet permettront de résolument inscrire le projet Nos milieux de vie! dans des objectifs d’approfondissement et d’élargissement qui seront l’occasion de promouvoir la transition écologique des milieux de vie, de l’arrondissement et de la ville de Montréal.

Ressources